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 Au clair de la lune

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Azriel
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Azriel


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MessageSujet: Au clair de la lune   Au clair de la lune Minihorlogeqq8Lun 16 Mar - 0:54

C’était alors en hiver. Il faisait nuit. Il neigeait. Tous, dans le village, dormaient du sommeil du juste. Tous ? Sauf un. Une mince lueur tremblotait encore à la fenêtre de la plus grande chambre de la plus haute tour du gigantesque château juché au sommet de l’énorme colline située au centre du petit bourg campagnard. L’ami de Piero veillait.
Insomniaque quand l’envie le prenait, il écrivait des vers à la lueur du clair de lune, sou l’égide bienveillante d’une chandelle. Il rêvait, soupirait après son cuisinier parti à la chasse. Piero lui manquait.
Penché sur sa feuille de parchemin, il attendait patiemment que son cacatoès lui dicte les lignes de son poème. Ce dernier, royalement perché sur son siège, le regardait d’un œil retord, lui en voulant toujours de lui avoir déplumé le derrière. « Pour Piero » s’était excusé son maître. Un sourire avait étiré ses lèvres à l’idée des bons petits plats que lui préparerait assurément son vieil ami dès son retour. « Beurk » s’était écrié l’oiseau, une expression de dégoût dans le regard à la seule pensée de voir ses amis, les hommes, manger ces graines qu’il détestait tant. « De la nourriture pour poussin ! » avait décrété l’animal.
« Au clair de la lune, mon ami Piero. Prête-moi ta plume, pour t’écrire un mot. Et après ? » Le jeune garçon s’était retourné sur son siège. Il regardait son cacatoès de ses yeux bon enfant, trop innocents, trop touchants, qui semblaient dire : « Pardon de t’avoir déplumé. On est toujours amis, hein ? Dis, dis ! » Difficile de résister à ce bambin. Accablé, le volatile secoua ses ailes. Il aurait voulu mille fois se retrouver de corvée en cuisine, plutôt que d’avoir à affronter les caprices de ce jeune duc. Par mégarde, ses mouvements précipités éteignirent l’unique bougie qui brûlait sur la table. La pièce se retrouva dans le noir total. L’enfant cria, appela son cacatoès à l’aide. Celui-ci, pris de panique, se retourna en tous sens, s’attendant à voir surgir à tout moment un bandit des grands chemins. Mais personne ne vint lui briser le coup. Soulagé, il se posa sur les épaules de son maître et articula : « Ce n’est rien petit. C’est ta chandelle qui s’est éteinte. » L’enfant sanglotait. « Elle est morte, elle est morte. » ne cessait-il de répéter. « Allons, il y en a d’autre. » répliqua le perroquet. « Où sont-elles d’ailleurs ? Et petit je te cause ! Où sont-elles tes bougies ? »
A ces mots, l’enfant hurla : « Elle est morte. Tu l’as tuée, tu l’as tuée. Vilain, méchant. Je vais le dire à Piero. » A ces mots, le cacatoès craignit pour sa vie. Il n’avait que trop conscience du sort réservé aux meurtriers. Il voulut se défendre. « Mais non, mais non. Regarde, elle vit encore. Il suffit de la rallumer. Regarde petit. » L’oiseau alla chercher une boîte d’allumettes. Il en prit une dans son bec, qu’il craqua. Mais au même moment, un courant d’air froid ouvrit violemment la fenêtre. L’allumette s’éteignit.
La boîte était vide. L’enfant s’en aperçu. Il hurla de plus belle. « Ma chandelle est morte. Je n’ai plus de feu ! » Il se renversa à terre, le siège avec lui, et le cacatoès avec lui. Son poème glissa sur le sol. La bourrasque l’emporta dans l’air froid de la nuit.
C’était alors en hiver. Il neigeait. Tous, dans le village, dormait du sommeil du juste. Tous ? Sauf un. De la fenêtre de la plus grande chambre de la plus haute tour du gigantesque château juché au sommet de l’énorme colline située au centre du petit bourg campagnard, un cri déchirant se fit entendre. Un cri d’animal à l’agonie. Le petit homme, ami de Piero et toujours à terre, s’était agrippé à son cacatoès. Et s’était fait un devoir de le déplumer. « Au secours. Au secours » suppliait l’animal. « Je suis innocent. Innocent ! » « Pour Piero, pour Piero » ajoutait l’enfant à chaque plume arrachée. « Au secours. Au secours. »
Fort heureusement, par un judicieux procédé – deux coups de bec et puis voilà – l’oiseau parvint à se soustraire des bras destructeurs de son jeune maître. Il aperçut, dans un tourbillon de plumes, la fenêtre encore grande ouvert. Il prit son élan, mais ne rencontra que du dur. Un nouveau courant d’air venait de refermer son unique sortie de secours. Déjà l’enfant reprenait ses assauts. « Au secours. Au secours. Ouvrez-moi la porte pour l’amour de Dieu ! » Le cacatoès volait à toute allure à travers la chambre. L’enfant après lui. L’enfant sauta. Il plongea. Il tomba, le perroquet dans ses bras. L’oiseau fit sa dernière prière. L’enfant répéta cette dernière phrase : « Pour Piero ». Et ce fut fait.
C’était alors en hiver. Il faisait nuit. Il neigeait. Tous, dans le village, dormaient du sommeil du juste. Tous ? Sauf deux. De la fenêtre de la plus grande chambre de la plus haute tour du gigantesque château juché au sommet de l’énorme colline située au centre du petit bourg campagnard, un grognement résonna dans le silence. Une voix terrible, pleine de colère. « Sale gamin ! Je t’avais dit de ne pas jouer avec le feu ! » La pièce s’était soudain rallumée. La porte était grande ouverte. Le cacatoès en avait profité pour vite sauver ses derniers vestiges. Piero se tenait là, les mains sur les hanches. Il était fou de rage, à la vue du désordre indéfinissable qui régnait dans la chambre. Des milliers de chandelles à demi-consumées jonchaient le sol. Quant au petit, il était aux anges. Un sourire béat illuminait son visage. Un beau sourire, trop innocent, trop touchant, qui semblait dire : « Enfin, je vais pouvoir manger ! » Vraiment difficile de résister à un tel bambin.
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