Un Dernier Coup De P*te, Avec Toute Mon Affection.

Un écrin de velours pourpre sur la commode.
J'avais déjà vu un nombre incalculable de flacons, bouteilles et fioles en tout genre sur ce vieux meuble.
Non, Judith ne fait pas ses courses à la superette du coin.
Ses essences viennent des plaines d'Orient, ses poudres des temples d'Inde, ses mascaras et kohls des terres perdues de Perse.

Comme toute sorcière, ou pute de luxe, Judith a ses petites ressources pour vous attirer.

Son parfum vous entraine malicieusement vers les ravins les plus profonds.
Sucré et suave, subtil et agressif.
Son sourire fait sauter chacun de vos verrous un à un.
Klik.
Klak.
Klok.
Son regard vous lacère langoureusement, sous ses sombres paupières, ombrelles noires de deux saphirs brûlants d'un feu glacé.
Et ma peau se fendait d'elle même, se fissurait sous ses lèvres.
Pyrogravure en temps réel, entrelacs fleurissants sur ma chair à vif.
Ces crevasses sans fond, d'où l'on voit bouillonner la lave en fusion.

A feu et à sang.

Un écrin de velours pourpre sur la commode.
Juste ce seul écrin, et rien d'autre, devant la glace de cette putain de commode.

Cette commode, qui a vu chaque matin cette pute agencer tous ses charmes.
Rituel du maquillage-ençorcelant à 6h du matin, petit hommage au Diable, avant d'aller faire flamber chaque atome de mon être dans un feu de joie dédié à sa PUTAIN DE BEAUTE.

Bref...
Juste cet écrin de velours pourpre, en face de son jumeau piégé dans le miroir.
Tiens d'ailleurs, plusieurs inscriptions au rouge à lèvre sur le-dit miroir...
Plus sexy qu'une banale lettre d'adieu...
Incandescente jusqu'à la fin Chérie.

Parce que c'est la fin.
La fin de la sorcière.

Judith m'en avait souvent parlé, de son flacon magique qu'elle chérissait tant.
Un philtre d'amour qui vous envoie embrasser la mort dans un tourment de souffrance passionnée.
Au chaud, dans un bel écrin de velours pourpre.

Là, tout de suite, devant mon regard blasé, le flacon gît au pied du lit.
Vide.
Les draps de soie noire tombent en cascade sur le parquet de la chambre.
Des draps brodés à la main, amples et luisant, suintant la luxure et le souvenir humide des ballets lassifs de ses cuisses autour de mon bassin.

A moitié couvert par les plis sombres, le corps de porcelaine de Judith, allongée sur le ventre.
Blanc immaculé.
Blanc cadavre.
Plus je m'en approche, plus le sang ralentit dans mes veines, comme glacé par le froid qui émane de ce nid de soie.
Un linceul modèle grand luxe Chérie...

La courbe autrefois tant embrassée, de son dos nu à ses hanches parfaitement dessinées.
Salope.
Salope.
Salope.
Elle me regarde encore.
Elle m'allume encore.
Elle m'enflamme encore.
Son regard m'adresse toujours la promesse de mille délices interminables.
Comme si elle allait se lever subitement, et à nouveau me murmurer tout ce qu'elle allait me faire et que je devrais lui faire, au creux de mon oreille.

Ses lèvres....
Putain ses lèvres...

Mon coeur, où ce qu'elle n'as pas pu finir de bouffer, remonte le long de ma gorge.
Vomir mon coeur.
Et partir libre.

Enfin, Judith est morte.
Ni plus, ni moins.

Une clope.
Une clope, une clope, une clope.
Je sors mon paquet de la poche intérieure de ma veste.
Pas de briquet, j'allume ma lucky à la flamme d'un cierge, brulant faiblement sur une étagère de la bibliothèque.
La lueur de la bougie vacille et ondule sur les reliures des vieux livres de la Salope.

"Le Vaudou en 47 leçons", "Le mauvais oeil, comment s'en protéger et l'utiliser", "poèmes anonymes d'un libertain", "Le pouvoir du regard", " Le Tantrisme et ses racines occultes", et j'en passe.

Une grande lectrice la ptite pute...

J'écrase ma cigarette dans la paume de la main de ma bien-aimée.
Krshhh.
Même brulée, sa peau sent bon.
Chrysanthème à peine éclose.

Un dernier baiser au creux du cou.
Adios sale chienne, adios mon amour.
Les marches de l'escalier hurlent sous mes pas précipités.
Me barrer, loin, très loin.

THE BITCH IS DEAD

Je suis venue de mon plein gré dans l'antre du Serpent et le Serpent s'est suicidé à l'annonce de ma venue.

. . . Bad Joke